La thérapie cellulaire et génique (TCG) est une véritable révolution dans le domaine de la santé. Ces « médicaments vivants » représentent souvent la seule option de traitement pour des patients atteints de maladies jusqu’ici incurables. Avec plus de 2000 traitements différents en cours d’élaboration, l’industrie prévoit une explosion du nombre de thérapies personnalisées approuvées dans les années à venir. Cependant, de nombreux patients ne pourront bénéficier de ces traitements vitaux en raison de leur disponibilité limitée à l’heure actuelle. La production de TCG est également extrêmement complexe et onéreuse car elle requiert des équipements spécialisés, des salles blanches et d’importantes équipes de techniciens de laboratoire expérimentés. La capacité mondiale est par conséquent limitée à quelque dizaines de milliers de doses par an et chaque lot peut coûter jusqu’à 2 millions d’euro – ce qui place ces thérapies hors de la portée financière de nombreux patients qui en ont besoin.
Un unique bioréacteur pour l’ensemble du processus de fabrication
Implantée à Lausanne, la start-up Limula est en train d’introduire l’automatisation dans l’industrie des TCG grâce à une solution révolutionnaire de traitement des cellules. Cette technologie comprend de nombreuses applications possibles mais la start-up se concentre actuellement sur la thérapie cellulaire CAR-T qui modifie génétiquement les cellules immunitaires d’un patient afin d’identifier et de cibler les cellules cancéreuses. Ce processus vise à isoler les cellules immunitaires du sang du patient, à les traiter dans un laboratoire et à les réinjecter dans l’organisme.
Le Dr Yann Pierson, CTO de Limula, a déposé un brevet pour une plateforme automatisée destinée au traitement des cellules immunitaires des patients et ne requérant aucune intervention manuelle. Son idée consiste en un petit bioréacteur, d’un litre de volume environ, qui est intégré dans un kit en plastique jetable, autonome et stérile, et monté sur un dispositif opératoire. Cette unité mécatronique peut réaliser consécutivement toutes les étapes requises pour produire des thérapies cellulaires, dans un système entièrement clos incluant la centrifugation. Le précieux sésame cellulaire – personnalisé pour chaque patient – demeure dans un unique contenant durant tout le processus. Le dispositif intègre de multiples solutions d’automatisation et ne nécessite ainsi aucune intervention manuelle.
La contribution du CSEM – du prototypage à la pré-industrialisation
Limula a reçu le soutien de l’équipe pluridisciplinaire talentueuse du département Tools for Life Science du CSEM dans le cadre d’un projet financé par Innosuisse, l’agence suisse pour l’encouragement de l’innovation. L’objectif était de définir le processus de fabrication le plus approprié pour une production industrielle à grande échelle du bioréacteur tout en préservant ses fonctionnalités. Cette collaboration a amené les deux équipes à mettre en commun leurs connaissances sur les exigences du processus, les éléments de conception et la biocompatibilité des matériaux. Le projet a abouti à une solution pré-industrielle qui est à présent exploitée par Limula et ses partenaires afin de tester la production de thérapies cellulaires. « Cette entreprise est un exemple typique de la multidisciplinarité que requièrent de nombreux projets de médecine régénérative, lorsqu’il s’agit de passer d’un prototype de laboratoire à une solution pré-industrielle », explique Diane Ledroit, Senior R&D Engineer Cell Microtechnologies au CSEM.
Rapprocher la production du patient
Les perspectives du marché sont très prometteuses : plus de 3 millions de patients pourraient être traités avec des thérapies cellulaires chaque année, bon nombre d’entre eux n’ayant pas d’autres options thérapeutiques. Luc Henry, CEO de Limula, indique : « Nous désirons proposer une technologie de plateforme qui favorise une transition en douceur entre les tests précliniques à petite échelle et la fabrication à grande échelle, une fois l’approbation reçue. Cela permettra aux prestataires de santé de produire, de manière sûre, davantage de doses de traitement TCG par mètre carré de salle blanche – et peut-être un jour d’accéder à une production décentralisée, directement à l’hôpital. » Et Gilles Weder, Co-Head Research & Business Development Life Science Technologies au CSEM, de souligner : « Au CSEM, nous rencontrons une demande accrue pour le développement de tels systèmes pré-industrialisés, en particulier pour des applications de médecine régénérative. »